Anti-Flag

Justin Sane, chanteur d’Anti-Flag, a accepté de répondre à nos quelques questions en amont du concert à Paris. Tournée, musique, politique, armes, animaux… Nous le savons engagé et avons souhaité en savoir plus. C’est avec brio qu’il nous apporte ses réponses. Justin Sane est français, c’est lui qui l’a dit !

 

Rock In Chair : Vous êtes en Europe depuis plusieurs semaines, comment se passe la tournée ?

Justin Sane : Oui tout a fait. Tout se passe vraiment bien, c’est une tournée vraiment cool ! « Très Bien » (il répond en français)

RIC : Oh donc tu parles français ! C’est parfait !

(Rires)

J-S : " Euhh non ! Comme ci comme ça ! " (en français)

RIC : Anti-Flag n’a pas fait beaucoup de concerts en France jusqu’à maintenant. Que penses tu du public français ? Est-il meilleur que le public allemand ou anglais ?

J-S : Si on mettait les fans français, anglais et allemands ensemble ça serait une bataille incroyable ! En fait les français les saigneraient à mort ! (Rires) Je blague.
Tu sais, une des choses merveilleuses de ce métier est que tu voyages beaucoup et rencontres des gens géniaux dans chaque ville. Et tu te rends compte que même si les cultures sont d’une certaine façon différente ou même la langue, les gens se ressemblent beaucoup. La plupart des gens ont les mêmes espoirs, les mêmes rêves, les mêmes peurs, le même sens de l’humour, ils s’intéressent aux mêmes choses. Alors c’est un sentiment agréable de voir que des gens de l’autre côté de l’océan s’intéressent aux mêmes choses que toi. Les publics sont semblables.

RIC : Mais nous sommes les meilleurs ?!

J-S : Oui bien sûr les français sont à part. (Rires) « Exceptionnels » ! (en français)
En fait, le public peut être très différent d’une ville à l’autre dans un même pays. Tu peux jouer dans une ville en Allemagne un jour avec un public génial et le lendemain dans une autre ville avec un public moins bien.

RIC : Comme vos paroles traitent beaucoup de la politique extérieure des Etats-Unis, est-ce que lorsque vous parlez à des fans en Europe, leurs réactions sont différentes de celles des fans américains ?

J-S : Non, je pense que c’est aussi très semblable. Par exemple, si on écrit une chanson sur un gamin qui a des soucis chez lui avec ses parents, la signification de cette chanson sera la même pour un gamin des Etats-Unis ou de France. Je veux dire que la plupart des gens rencontrent les mêmes problèmes. Même si l’on traite de problèmes dans la politique des Etats-Unis, la plupart des français arrivent à comprendre. En fait il y a beaucoup de similitudes.

RIC : Votre EP intitulé « A benefit for victims of violent crime » est sorti juste quelques mois avant votre nouvel album « The Bright Lights of America ». Est-ce que votre état d’esprit lors de la création a été différent suite aux évènements ? (Assassinat de la sœur de Chris #2)

J-S : Oui absolument. Les choses ont été totalement différentes. Je pense que le nouvel album est vraiment différent des précédents. Plein de choses se sont passées… l’assassinat de la sœur de Chris #2 a eu un énorme impact sur nous tous, on s’est rendu compte que la vie peut être très courte, alors il ne faut surtout pas avoir peur de vivre sa vie au maximum. On a voulu tenter autre chose musicalement, essayer de nouvelles choses et c’est ce que l’on a fait. Et au fur et à mesure de l’écriture des paroles, ces évènements nous ont amenés à écrire des choses plus personnelles. On avait chacun des problèmes dans nos vies, surtout Chris #2 mais j’avais aussi des problèmes dans ma vie sentimentale. Peu de temps après le drame concernant Chris #2, on a recommencé à faire des concerts et les gens venaient nous voir et voulaient partager leur peine avec nous. C’était vraiment intéressant de voir qu’ils partageaient la peine de Chris #2 et se sont mis à nous raconter des choses atroces qu’ils avaient pu vivre…Et c’est quelque chose dont on n’avait pas l’habitude, on ne pensait pas que ça puisse se produire. On s’est rendu compte qu’il y avait comme une envie ou un besoin d’écrire cet album pour montrer aux gens que la vie nous réserve tous des épreuves et que si tu passes par des moments difficiles, tu n’es pas seul. C’est vraiment la signification de cet album pour moi comme dans une chanson telle que « The Bright Lights Of America » ou « We Are The Lost ». Par exemple, dans « The Bright Lights Of America »  je parle d’une fille que j’ai rencontrée à un concert et qui m’a dit qu’elle se mutilait les bras ou encore d’un garçon que j’ai aussi rencontré à un concert qui est tombé dans le milieu de la drogue. Ces sujets sont sombres mais au final les chansons sont plutôt optimistes car on passe tous par des moments difficiles et en allant ensemble à un concert on peut se soutenir les uns les autres grâce à la musique. Lorsque j’ai eu des gros soucis dans ma vie et que je n’avais rien, même pas la musique pour m’aider, que rien n’allait comme je voulais et que peut être je n’avais plus l’envie de vivre comme ça plus longtemps, si 2 ou 3 heures passées à assister à un concert ou jouer sur scène peuvent me faire passer à travers cela et vivre enfin, alors c’est génial. Et finalement c’est vraiment ce qu’est l’album, je pense que le côté personnel est lié à la politique car on se demande où se situent les problèmes dans notre société pour que les gens touchent à la drogue ou soit en dépression. C’est pour cela que malgré l’aspect personnel, il y a aussi une part de politique. Cet album est destiné à ce que les gens se posent plus de questions sur leur vie et leur place dans ce monde, c’est aussi pour cela qu’il n’y a pas de gros livret explicatif dans cet album avec des explications politiques. On voulait vraiment que les gens regardent en eux et non à l’extérieur…

RIC : Alors s’il n’y avait pas eu l’EP, vous auriez peut-être pris une autre direction non ?

J-S : Oui probablement. J’en suis même certain. Les choses changent… la vie passe et les choses évoluent en conséquence.

RIC : J’aime vraiment le nouvel album. On ressent vraiment le côté personnel que vous avez apporté. Il est vraiment différent des autres albums.

J-S : C’est super… ça signifie beaucoup pour moi. Merci beaucoup.

RIC : Je sais que vous soutenez Peta.

J-S : Oui ! … On dit Peta (« Pita »)

RIC : Oh ok…

(Rires)

J-S : Mais c’est ok !

(Rires)

J-S : On dit Anti-Flag (« N » « taï » Flag) et vous dites Anti-Flag (« Anti » Flag) alors il n’y a pas de soucis !

RIC : J’essaie de dire Anti-Flag (« N » « taï » flag) depuis quelques temps !

J-S : Oh ok c’est parfait ! (Rires)

RIC : Depuis quand supportez vous Peta ?

J-S : Oh depuis des années, de très longues années.

RIC : Etiez-vous déjà végétariens ?

J-S : Oui oui. Mes parents avaient un restaurant végétarien quand j’étais enfant et la plupart des membres d’Anti-Flag sont végétariens depuis très longtemps.

RIC : J’ai entendu dire que Franck Iero a remporté le titre de végétarien le plus sexy dans le cadre d’un concours avec Peta…
(Rires)
Es-tu jaloux ?

J-S : Hum… oui des fois…

RIC : Je comprends…

J-S : Tu sais, c’est dur… j’essaie de vivre avec la honte….(Rires)

RIC : Ouais c’est dur…

J-S : Ca l’est … ça craint ! (Rires)

RIC : Est-ce que vous participez à d’autres projets concernant la protection animale ?

J-S : Et bien, travailler avec Peta est la principale action que nous faisons. A part dans nos vies privées où lorsque les gens veulent qu’on mange un hamburger et que je leur explique pourquoi je n’en mange pas, mais sinon, non je pense que Peta est vraiment notre plus gros engagement sur ce sujet.

RIC : Peta devient de plus en plus populaire grâce à des groupes et des gens comme toi, c’est vraiment intéressant.

J-S : Oui en effet, c’est très efficace et c’est pour cela que j’aime travailler avec eux, ils abordent les choses avec beaucoup d’intelligence et ils existent depuis longtemps, même depuis toujours. Ce n’est que récemment que les gens ont commencé à les connaître. C’est comme ce que tu dis, c’est le résultat du travail avec différents musiciens, célébrités ou d’autres personnes.

RIC : J’ai entendu dans une interview de Chris #2 et Pat au Bamboozle que vous alliez évidemment soutenir Barack Obama pour les prochaines élections.

J-S : Oui tout a fait !

RIC : J’aimerais savoir qui aurais-tu choisi entre Hillary Clinton et Barack Obama si tu avais pu ?

J-S : J’aurais choisi Barack Obama parce que je pense qu’il est plus progressif que Hillary Clinton. D’ailleurs j’ai écris un blog concernant cela, tu peux le retrouver en tapant dans un moteur de recherche : Justin Sane blurt. Ensuite, il y a d’autres candidats démocrates que j’aurais préféré à Barack Obama comme John Edwards mais ils n’ont pas réussi à faire partie des nommés et donc le choix se limitait à Hillary Clinton et Barack Obama. Je pense que Barack Obama est en plusieurs points meilleur que Clinton mais il n’était pas mon premier choix. En tous cas, une chose est sûre, John McCain ne serait que 4 ans de Bush en plus et j’espère que personne ne veut ça…

RIC : Ok. En France les médias ont énormément parlé de la bataille entre Barack Obama et Hillary Clinton. Au final, ils n’ont pas beaucoup parlé de John McCain. Est-ce qu’aux Etats-Unis on ressent que Barack Obama a une chance de gagner ?

J -S: Oui, il a de très grande chance même. Les élections sont loin, les choses peuvent encore changer d’ici là mais au moment présent il est bien plus populaire que John McCain. John MacCain est très proche de Georges Bush et lui n’est plus du tout populaire aux Etats-Unis. Il s’est occupé des Etats-Unis pendant sept ans et les gens ont fini par se rendre compte que c’est un abruti. Si on pouvait reprendre les choses depuis le début tout irait mieux ! Mais oui, je pense que Obama a de grandes chances de gagner. L’économie des Etats-Unis ne va pas bien, les gens réalisent que la guerre en Irak était une grosse erreur, la plupart des gens n’acceptent pas ce qui se passe dans les bases de Guantanamo, de même que la plupart sont d’accord avec le fait que les femmes ont le droit de contrôler leur corps et il y a aussi le problème de la sécurité sociale et ce sont des projets important pour Barack Obama contrairement à John McCain. Il faut croiser les doigts !

RIC : On croisera aussi nos doigts ! J’ai entendu dire que la loi sur le port d’armes a été revotée récemment. Penses tu que l’état d’esprit des américain a tout de même évolué suite aux récents drames ?

J-S : Non je ne pense pas que leur état d’esprit ait changé…Les américains aiment leurs armes, ils en sont même dingue. Tu sais, la plupart des américains ont des armes mais ne les utilisent pas. Et beaucoup d’entre eux ne voient pas les armes comme la source du problème parce que la plupart de ces personnes sont des gens bien qui ne tireront jamais sur quelqu’un. Mais ce qu’ils ne comprennent pas c’est que même les gens fous ou violents ont accès à ces armes et que du coup beaucoup de gens ont été tués à cause de cet accès aux armes. Je pense qu’il y a une sorte d’ignorance des américains en ce qui concerne les armes. Ils ne font pas le lien entre les armes et les meurtres et je sais que cela semble absurde car le problème est évident !

RIC : Oui en effet ! En France on se demande vraiment comment font-ils pour ne pas comprendre tellement c’est évident ! Le problème est très simple : Non Aux Armes !

(Rires)

J-S : Je le pense aussi ! Je suis peut être français ! (Rires)

RIC : Après Columbine, Virginia Tech et d’autres, on se demande vraiment ce qu’ils attendent pour réagir ! J’espère que cela changera…

J-S : Oui … En tous cas, je ne retiendrais pas ma respiration ! (Rires)

RIC : J’ai une amie qui voulait te poser une question.

J-S : Ok cool !

RIC : Elle aimerait savoir pour toi ce que signifie d’être un punk aujourd’hui ?

J-S : Et bien… Ca a toujours été assez difficile de répondre à cette question parce que je pense que le punk rock a une définition tellement différente selon les gens et la communauté punk est vraiment vaste dans notre société. Je peux juste donner ma définition. Et pour moi cela signifie être tolérant envers les gens, envers leur idées, et essayer d’accepter les gens pour qui ils sont et respecter les gens du moment qu’ils sont bons pour toi. Tu sais, je pense qu’en fait, ce que j’aime dans le punk rock c’est que ça te permet d’être qui tu es vraiment et c’est la communauté punk rock dont je veux faire partie. On est dans un monde où des gens jugent les autres par la couleur de leur peau, leur religion, leur sexe, leur salaire ou leur nationalité. C’est l’image du punk que j’avais. Pour certain cela dépend d’un état d’esprit, d’une coupe de cheveux, du t-shirt que tu portes, d’un jean ou d’une veste usés. Mais il existe beaucoup de définition. Est-ce que le punk est mort ? Non !! On est là !

RIC : Ta définition du punk est vraiment intéressante. Ce que j’en retire c’est que pour toi être punk c’est être humain.

J-S : Merci beaucoup et oui c’est vrai, je pense que ça résume bien.

RIC : Les punks ne sont pas juste des gens fous !

J-S : Oui je suis d’accord et c’est intéressant parce qu’il y a des gens qui pensent qu’être punk c’est tout casser, être infecte avec les autres et si c’est ça pour eux très bien , mais ça ne me parle pas, ce n’est pas une chose dont je veux faire partie.

RIC : Merci beaucoup pour l’interview Justin.

J-S : Merci à toi ! A tout à l’heure au concert !




Charlotte / Juliette